Les principales fonctions du roman – Réalité et fiction

LES PRINCIPALES FONCTIONS DU ROMAN.
CHAPITRE 1. RÉALITÉ ET FICTION
Il n’y a pas que le cinéma ou la télévision qui produit des films apparemment inspirés d’événements réels. Des écrivains également, et bien avant l’arrivée de ces supports technologiques, ont su produire des romans qui semblent si vraisemblables qu’on les croiraient tirés d’histoires vraies dans le temps ou dans l’espace. Cette réalité est d’autant plus vraie que ces deux arts, cinéma et littérature, s’associent’souvent pour donner naissance à des œuvres cinématographiques qui étaient à l’origine des romans. De ce fait, de nombreux témoignages prouvent que celui qui a lu l’œuvre court vers le film et celui qui a vu le film se rue sur le livre, dès que l’occasion se présente. Pour ce qui s’agit du roman à proprement parler, à travers les genres romanesques, apprenons donc à découvrir la part de vrai, de faux et surtout la symbiose des deux.
1. LA PHOTOGRAPHIE DU RÉEL.
Nous parlons d’histoire racontée et inspirée du réel ; comme l’a dit Stendhal dans Le Rouge et le Noir au chapitre XIX de la deuxième partie : « un roman est un miroir qui se promène sur une grande route. Tantôt il reflète à vos yeux l’azur des cieux, tantôt la fange des bourbiers de la route ». Ainsi, pour plusieurs romanciers, l’œuvre d’art doit faire vrai, c’est-à-dire être vraisemblable pour atteindre l’un de ces trois objectifs.
D’abord, le roman peut se révéler comme un moyen efficace de ressusciter le passé afin de rappeler à la nouvelle génération ce qu’elle a oublié ou qu’elle a banalisé, car quiconque connaît bien son passé gère bien son présent pour mieux préparer son avenir. C’est le cas de l’œuvre de Ousmane Sembène, Les Bouts-de-bois de Dieu, un ROMAN HISTORIQUE où l’écrivain de la négritude met en scène toutes les conséquences sociales de la grève des cheminots du Dakar – Niger, en pleine époque coloniale.
En outre, pour d’autres écrivains, le roman est un cadre idéal pour reproduire leur propre vie. En effet, des romanciers relatent avec beaucoup de fidélité des événements dont ils ont été témoins ou acteurs. C’est l’exemple du ROMAN ÉPISTOLAIRE ou du ROMAN AUTOBIOGRAPHIQUE (même si l’auteur s’en défend) de Mariama Bâ intitulé Une si longue lettre où l’histoire est un simple prétexte pour fustiger toutes les habitudes peu catholiques relatives aux dérives sociales mais aussi à certains hommes irresponsables envers des femmes vertueuses.
Enfin, d’autres encore utilisent le roman comme moyen de révolte contre une injustice subie par la société à cause d’autorités uniquement dévouées à se remplir les poches. Que la critique soit satirique, pathétique ou humoristique, chacun des tons employés va dans le sens de démasquer les vrais responsables qui maltraitent de pauvres innocents. À titre indicatif, on se souvient des romans de contestation produits par des écrivains négro-africains ou encore le ROMAN SOCIAL ou ROMAN DE MOEURS des réalistes et des naturalistes, à l’instar de Émile Zola qui décrit imperturbablement, dans Germinal, la misère, la fatigue, la vieillesse, les risques du métier, etc. auxquelles est exposée la pléthorique classe prolétaire au grand bénéfice des bourgeois minoritaires.
En un mot, entre autres raisons, si ce n’est pas pour immortaliser le passé ou pour parler de soi selon des raisons diverses, c’est pour soigner nos habitudes quotidiennes, que la plupart des romanciers s’inspirent de plus près du réel qu’ils tentent de restituer avec fidélité.
2. L’INVENTION DU RÉEL.
Avant la découverte et l’utilisation, à portée de main, des nouvelles technologies telles que la radio, la télévision, le téléphone, Internet…, nombreux furent les lecteurs qui cherchaient dans les romans, et jusqu’à présent, un moyen de s’évader, de se soulager des soucis quotidiens liés au travail, à la famille, aux sentiments, et de s’en éloigner, ne serait-ce que pendant quelques instants de lecture. Nombreux également sont les romanciers qui leur en offrent généreusement l’opportunité par le biais du livre, ce formidable instrument qui permet de voyager sans bouger. En effet, restée un loisir à part entière, la lecture offre l’opportunité d’aller à la découverte des lieux féeriques, célèbres historiques, qui côtoient si harmonieusement notre environnement immédiat ou psychologique que le lecteur a l’impression d’y être allé. Les actions sont multiples et les intrigues suscitent davantage la curiosité, sans parler des héros avec qui nous sympathisons à telle enseigne qu’on oublie, pendant le temps que dure la lecture, tous les soucis. Pourtant, ces histoires sont le fruit se l’imagination de l’artiste qui impressionne grâce à la seule force se sont génie créateur.
Ainsi, les types de romans qui s’associent à ce projet sont les ROMANS D’AVENTURES, les ROMANS D’ANTICIPATION, les ROMANS POLICIERS, les ROMANS DE JEUNESSE, les ROMANS À L’EAU DE ROSE… C’est exactement comme l’œuvre de Jules Verne d’ailleurs adaptée à l’écran sous forme de dessins animés et intitulée Le Tour du monde en 80 jours ; en compagnie de son domestique Jean Passepartout, Phileas Fogg déjouera-t-il tous les pièges et les pronostics en réussissant son pari fou de faire le tour de la terre en moins de deux mois et vingt jours, au beau milieu du XIXème siècle, au moment où les moyens de transport moderne, cahin-caha, n’en étaient qu’à leurs premiers balbutiements ? Telle est la récurrente question que le lecteur se pose au milieu de tous ces soubresauts, de ces coups de théâtre, de ces nombreux obstacles qui se mettent en travers du parcours du héros.
3. ENTRE RÉALITÉ ET FICTION.
Beaucoup de détracteurs prétendent que le romancier ment comme un arracheur de dents ; et ils appuient leur avis, disons cette idée reçue, sur l’imagination fertile de l’écrivain qui produit ses romans à l’eau de rose dans l’intimité de son isoloir. Tout de même, combien de fois les hommes dont ces détracteurs font partie font-ils des paris, des prédictions, des pronostics,… avec espoir de voir se réaliser des vœux pour lesquels ils ont misé gros ? Pourtant, le romancier ne fait pas le contraire ; par la force de son imagination qui lui donne ce pouvoir révélé par la physique quantique de pouvoir vivre dans un univers en division permanente, les artistes qui savent en saisir les mécanismes ont souvent l’occasion de passer d’un univers à un autre. Ces univers ou couloirs parallèles où ils se baladent comme si c’était leurs lieux communs leur donnent le loisir de prédire ce monde bien réel mais qui n’est pas encore né. Que dire de Jules Verne qui, dans De la Terre à la lune (1865) et Autour de la Lune (1869), décrit des conditions analogues à celles qui, le lundi 21 juillet 1969, permirent à Louis Armstrong et ses compagnons de Apollo 11 de poser pied sur la lune ? Pourtant, quand ces romans avaient paru l’un après l’autre, ils étaient méprisés, voire rangés dans l’ordre de ces œuvres de fiction de bas étage qui ne font que divertir. Que dire de Futility, ce roman de Morgan Robertson publié en 1898 qui raconte à peu près les mêmes circonstances du naufrage du Titanic lors de cette fameuse nuit du 13 au 14 avril 1912 ? En cinq pages, avec une précision à vous couper le souffle quand vous en faites la comparaison, en 14 ans, cet auteur est passé d’auteur peu connu à homme visionnaire. Plus près de nous, que dire de Tom Clancy, ce romancier devenu célèbre pour avoir décrit dans Dette d’honneur, publié en 1994, un attentat semblable à ceux auxquels le monde entier assistera le 11 septembre 2001 ? « Près de 300 tonnes d’acier et de kérosène percutèrent la façade du bâtiment à une vitesse de 550 k/h » avait-il écrit. Ces romans cités ne constituent pas quelques exceptions mais des échantillons d’infinités de productions romanesques qui prouvent que le romancier fait mieux que représenter la réalité : il le précède. En un mot, ces ROMANS D’ANTICIPATION dits prémonitoires démontrent toute la part de vrai dans ce semblant de faux.
Par ailleurs, si ici un romancier s’inspire de ce monde d’aujourd’hui pour prédire celui de demain, un autre réussit à se positionner à la croisée des chemins, entre réalité et fiction. Dit autrement, l’écrivain puise la source de son inspiration autant dans le réel que dans l’imaginaire pour composer son récit. Avec leurs ROMANS DE MŒURS, les auteurs réalistes justement sont passés maîtres dans cet art en demi-teinte. Des détracteurs s’en sont justement pris à eux, les taxant de faussaires car nul ne peut représenter la réalité, rien que la réalité, encore moins toute la réalité. C’est une lapalissade, bien évidemment ! Un artiste choisit des parcelles d’une vie, d’un temps ou d’un espace qu’il restitue avec une harmonie qui séduit. S’il fait autre chose que cette sélection, il est tout sauf artiste et se fera peut-être appeler journaliste ou historien. Ces écrivains s’inspirent donc le plus souvent de faits divers tels que nous en lisons dans les journaux au quotidien ou encore de l’actualité brûlante telle qu’une liesse, une grogne populaire, un fait historique… Au lieu d’avoir la prétention de tout représenter, c’est-à-dire chaque parcelle de terrain (le cadre spatial) et chaque seconde de l’existence (le cadre temporel), l’esprit sélectif de l’artiste préfère saisir ces cadres et ces instants pour focaliser l’attention du lecteur sur ce qu’il voudrait lui faire voir tout simplement. En restant dans cette mouvance, retenons par ailleurs ces propos de Nicolas Boileau-Despréaux : « le vrai peut quelquefois n’être pas vraisemblable » – et cela, les réalistes l’avaient si bien intégré dans leur esthétique qu’ils s’étaient fait appeler « illusionnistes » au départ – juste pour dire que, en faisant allusion à Guy de Maupassant dans la préface de Pierre et Jean, faire vrai consiste donc à créer l’illusion de celui-ci moins dans le pêle-mêle de leur succession que dans une logique plus concertée, du vrai représenté avec une précision que même la réalité ne révèle pas toujours. En somme, à travers le roman de mœurs, appelé aussi roman réaliste ou roman social, le roman offre à son auteur la possibilité de faire du vrai dans du faux et vice-versa. En combinant habilement les éléments de la vie réelle avec des événements fictifs, le romancier peut créer un contexte crédible et authentique en s’inspirant de son expérience personnelle, de l’histoire, de la science,… Justement, c’est pour cette raison qu’il arrive que le lecteur s’identifie dans ses personnages pourtant fictifs car il y a toujours quelque chose d’universel qui les unit.
Issa Laye DIAW
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